souffles
numéro 12, quatrième trimestre 1968

action plastique
t.m.m. : marrakech     hôtel des Almoravides
p. 49

 


 
architectes       a. faraoui       p. de mazières

L'édifice donne, côté sud, sur le panorama de la ville ancienne. Un mur de roseau l'en sépare. C'est une architecture sobre, dépouillée, et dans l'ensemble, assez intégrée. Ce n'est pas une forteresse à touristes.

Pour respecter l'ensemble urbain dans lequel elle s'inscrit, les détails trop voyants, le blanc et l'excès de béton brut ont été évités aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur du bâtiment. Des matières chaudes, qui tendent à prendre avec le temps une patine organique, ont été introduites : murs en brique, bois vernis ou non vernis, surfaces peintes on ocre.

Je trouve qu'en général, l'architecture moderne faite au Maroc, demeure souvent aliénée à cause d'un parti-pris individualiste et d'un corbusianisme mal placé. Dans cette réalisation au contraire, nous sommes en présence d'une recherche méditée de formes plus souples et globales, d'une confrontation consciente avec l'espace donné et ses exigences.

Il y a ici une tentative honnête d'intégration plastique au niveau de la programmation. Les artistes ont conçu leurs travaux en fonction d'un espace et d'une finalité donnés. Les matières, les couleurs, les formes ont été étudiées de manière à ce qu'elles soient incorporées dans l'esprit de l'ensemble, dans sa structure interne. Cela n'exclut pris quelques fautes de réalisation, mais l'effort déployé dans l'ensemble demeure intéressant et le résultat très appréciable.

Il n'y a pas ici cet assemblage hétéroclite ou exotique qui caractérise la majorité des hôtels, ni le désir égoïste de la part des architectes de vouloir se passer des artistes. La participation de ces derniers a d'ailleurs été à la fois bien dosée et discrète.

Ont participé à ce projet : Mohammed Melehi, qui a réalisé deux panneaux (un dans le bar et l'autre dans le restaurant) composés d'éléments en terre cuite ocre alternés avec d'autres en céramique colorée.

Farid Belkahia qui a réalisé dans le hall une porte en cuivre et un panneau en éléments de cuivre sur acier.

Le prototype d'une lampe quadrangulaire et l'enseigne en bois de l'hôtel ont été dessinés par Mohammed Chebaa.

Les panneaux en bois, en forme de portes coulissantes et leurs peintures géométriques ont été réalisés (pour les chambres) par des artisans de la ville sous la direction de C. Boccara, décoratrice de Marrakech qui a aussi dessiné des lampes en verre.

Cette brève chronique voudrait surtout attirer l'attention sur l'intérêt d'un tel travail de groupe. C'est un essai d'intégration consciente à l'architecture et une expérience qui a cristallisé un aspect important de l'action plastique des artistes nationaux.
 

t.m.m.


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